Dubuffet Typographe
Pierre Leguillon
Vit et travaille à Bruxelles (Belgique).
Date :
2013
Technique :
Edition, 364 pages
Dimensions :
15,2 x 21 cm
Jean Dubuffet (1901-1985) n'a jamais été typographe, et ce titre, Dubuffet Typographe, sonne de prime abord comme une forme de provocation. Alors que l'œuvre de Dubuffet est aujourd'hui canonisée, et semble avoir subie une mise entre parenthèses de son pouvoir critique d'évocation, celle-ci représente littéralement pour Pierre Leguillon un prétexte.
Le prétexte à traiter du devenir de l'écriture à l'heure où l'ère digitale délégitime progressivement l'écriture manuscrite. En voyageant entre archives publiques et privées telles que celles de la Fondation Dubuffet à Paris, de la Bibliothèque Kandinsky au Centre Pompidou ou de l'IMEC à Caen, Leguillon a collecté une variété d'ephemera comme des catalogues, des livres d'artistes, des carnets de notes ou de langues, des affiches, des invitations ou encore des pochettes de disques ; ces images ayant été ensuite ré-agencées pour produire une sorte d'anti-manuel de typographie où se succèdent des familles fictives de sujets, vocabulaires, styles ou codes. La constellation des jeux typographiques à l'œuvre chez Dubuffet peut dessiner une forme de « stratégie marketing » délibérée – sa griffe ou sa marque. Mais l'opération s'avère duplice. Usant de l'éventail des possibilités données par les techniques de reproduction (linogravure, lithographie, offset, etc.), Dubuffet n'apparaît pas ici comme un calligraphe (technique qui présuppose l'unicité du signe produit), l'écriture étant ici presque toujours soumise à sa duplication. Et dans la lutte que mena Dubuffet contre la culture, ou pour « l'anti-culture », à partir des années 1950, son travail de sape des caractères typographiques et des principes de mise en page standardisés peut apparaître comme le parachèvement visuel de sa minutieuse entreprise de destruction du langage.