View of the installation 'The Show is over,'
17min
Online event since 3 years et 9 mois Online event since 3 years et 9 mois Online event since 3 years et 9 mois

Tour

Virtual tour of the visionary company exhibition

En ligne

Wednesday 31 Mar 2021 from 4:30pm to 5:30pm

Thursday 01 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm

Wednesday 07 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Monday 12 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Wednesday 14 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Monday 19 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Wednesday 21 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Monday 26 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Wednesday 28 Apr 2021 from 1:30pm to 2:30pm, from 4:30pm to 5:30pm

Thursday 29 Apr 2021 from 8am to 1pm

Free entry

Discover our exhibition from the comfort of your own home!

You are invited to follow a filmed journey to the heart of visionary company, commented by Rebecca Lamarche-Vadel, director of the Foundation.

During the exhibition period, a time of interaction was proposed with the mediator and the other visitors connected to the exhibition, at the end of the tour.

The visit took place via Zoom.
Our mediation team during a virtual tour within the exhibition space

Transcript

Lorsque l’on pénètre dans l’exposition du Wu Tsang on est d’abord accueillis par un espace plongé dans l’obscurité.

Cette obscurité est un espace qui nous protège, en même temps qui nous invite à découvrir des choses invisibles. Des choses que peut-être on n’était pas à même de pouvoir percevoir. Le visiteur est ainsi invité à parcourir un mur, un mur courbe qui lui permet de rien voir, mais d’entendre une rumeur. Cette rumeur c’est la rumeur, le bruit d’un film qui va l’accueillir. Un film gigantesque, monumental qui s’appelle The Show is Over,.
 

Mais avant de plonger dans cette vidéo, la première œuvre que l’on découvre c’est un escalier. Un escalier qui à première vue paraît être une forme géométrique parfaite, c'est-à-dire qu’il dessine un triangle, dont on peut identifier la base ainsi que les angles. Et il s’avère que lorsque l’on bouge et que l’on se meut autour de cette œuvre, il apparaît que, ce qu’on pensait être une forme parfaite est en fait éclatée. Ce que l’on pensait être proche est en fait loin, ce que pensait être loin est en fait proche et l’ensemble de cet oeuvre nous invite à penser que tout est une question de perception, de position dans l’espace, de position dans le monde, et qu’en fait, la manière avec laquelle nous percevons ce fameux monde que l’on habite dépend bien souvent de la position que l’on peut occuper à travers lui. Et l’ensemble du projet de Wu Tsang, c’est certainement un appel à repenser nos positions, à réfléchir à comment certaines et certains d’entre nous se retrouvent assigner une certaine place dans la société alors que d’autres peuvent jouir d’autres positions. C’est une invitation permanente à repenser ce que l’on pensait définitif, permanent. Une invitation à célébrer la libération de l’être et la libération de l’être trop souvent étreint par des règles qui le dépassent mais aussi par des héritages, des héritages historiques

 

C’est justement le travail et l’ensemble des questions qui sont posées par la vidéo qu’on découvre ensuite, The Show Is Over, dont on avait entendu la clameur, et qui nous plonge dans une chorégraphie. Cette chorégraphie elle est interprétée par des êtres, un groupe dont on sent que chacun des individus occupent une place qui se transforme, tantôt en oppresseur, tantôt en oppressé·e. Ce sont aussi des personnages qui finalement incarnent différentes étapes de l’histoire. Une histoire qui est pour Wu Tsang marquée par des conflits, des conflits notamment liés à la couleur de peau de certains individus et l’oppression qui a pu être établie sur certains d’entre eux. Cette chorégraphie, cette danse, cet idée du geste c’est pour Wu Tsang, une réflexion autour de la manière avec laquelle nous habitons le monde, la manière avec laquelle les gestes que l’on peut y faire, que ce soit des gestes d’oppression, de répression ou au contraire de libération racontent une histoire de l’humanité. On entend dans cette vidéo, les paroles de Fred Moten, un écrivain très important pour penser l’histoire de la Blackness ou de la Black Theory, un mouvement théorique américain très important, qui a permis aux populations noires et de couleur de penser leur histoire. Penser dans tous les sens du terme, c'est-à-dire réfléchir à comment aujourd’hui… essayer de réinventer les positions que chacunes et chacuns occupent dans une société où l'on sait que les injustices sont criantes. Et l’actualité nous l’a malheureusement rappelé. Cette vidéo est donc un moment dans lequel on redécouvre ces fameux escaliers. Des escaliers sur lesquels les personnages qui sont dans la vidéo, peuvent monter, descendre, changer de place. Et donc une métaphore encore une fois de cette idée de la fluidité de l’être dans une société qui ne dépend que de ce qu’on fait d’elle et la manière avec laquelle nous décidons tou·te·s ensemble en tant que corps collectif de l’écrire. Les paroles de Fred Moten nous rappellent aussi que finalement une des voies possible de futur pour l’humanité, d’avenir désirable pour l’humanité, c’est celui d’un lien beaucoup plus profond avec la terre et cette phrase est souvent répétée “le monde est terre sèche, la terre est d’eau”. C’est à dire nous rappeler que la terre et notre présence en son sein est une affaire de relation, est une affaire d’interdépendance, est une affaire de collaboration. Et que dès lors que, nous humains nous avons décidé de faire de la terre un être servile dont nous pouvons nous servir en permanence et dont nous pouvons épuiser les ressources, alors il n’y aura probablement aucun avenir possible

 

Lorsque nous montons dans les espaces à l’étage supérieur, on est plongé et on doit passer par des lieux qui sont d’aventure normalement fermés au public. Et il s’agit pour Wu Tsang en tant qu’artiste de nous inviter à changer de perspective autant au travers des oeuvres, qu’au travers de l’expérience que l’on fait de l’espace dans la Fondation. C’est à dire qu’on découvre ici des lieux qui sont normalement cachés, qui sont normalement dédiés à des flux qui sont invisibles et encore une fois, il s’agit de faire une expérience qui ne soit pas qu’une expérience visuelle ou qu’une expérience spirituelle, mais aussi une expérience physique de ce que veut dire changer de trajectoire et découvrir d’autres chemins.

 

Lorsque l’on pénètre dans l’étage supérieur on est accueilli par une pièce lumineuse qui est un néon. Et ce néon arbore une phrase, qui est une phrase militante qui veut dire The Fist is Still Up, c'est-à-dire que le poing est toujours levé. Cette œuvre s’appelle Safe Space, en français un espace de protection, un espace rassurant. C’est l’idée que nous pouvons et il existe, au sein de nos lieux, de nos territoires, les lieux dans lesquels on vit, des espaces que l’on peut imaginer comme des espaces sécurisant dans lesquels l’individu peut écrire une autre histoire que celle qu’on connaît, normée de l’individu. Cette pièce fait référence en fait à une histoire et à un engagement historique de Wu Tsang en faveur de communautés qui ne sont pas des communautés blanches ou privilégiées mais plutôt des communautés rassemblant des personnalités transgenres, de couleur, notamment à Los Angeles où elle avait ouvert un club. Et ce club en fait était un lieu où ces communautés pouvaient se retrouver danser, pleurer, crier, chanter, créer ensemble la nuit venue. C’était aussi un espace de réflexion autour de leur condition, autour de leur manière, de la manière, des manières possibles pour faire valoir ces conditions là et enfin être reconnues comme dignes d’une humanité qui a pu pendant les siècles qui nous précèdent leur être refusée. The Fist Is Still Up c’est aussi une espèce de monument au fait que le présent est toujours conflictuel, est toujours problématique et notre expérience du monde aujourd’hui nous le rappelle en permanence. L’ensemble des obstacles, l’ensemble des fractures qui divisent notre société restent aujourd’hui à penser, restent des sujets et des domaines sur lesquels ils nous incombent à chacun de travailler. Néanmoins cette enseigne est lumineuse, cette enseigne nous invite à penser la lumière au milieu de la nuit. Cette espèce de signe qui est un signe d’appel, un signe d’espoir, un signe qui nous invite chacune et chacun à nous mobiliser en faveur d’une humanité plus vaste, beaucoup plus inclusive et beaucoup plus généreuse. 

 

En regard de cette œuvre, Safe Space, on trouve cette gigantesque sculpture, Sustained Glass. Alors il faut imaginer que la Fondation a été complètement métamorphosée pour cette exposition et comme un espèce de grand automate qu’elle est, elle s’est faite, elle s’est parée d’une nouvelle scénographie pour accueillir les œuvres de l’artiste. Et là quand on fait face à cette œuvre Sustained Glass on est vraiment plongé dans une architecture très proche de celle du sacré, très verticale, c’est-à-dire que l’on a vraiment repris des codes que l’on connaît si bien de la religion. Sauf que sur cette oeuvre qui a été faite elle aussi en vitrail grâce au savoir-faire d’artisans incroyable qui viennent de Bavière, qui sont parmi les derniers à connaître ce genre de pratiques, on découvre de mots, des mots qui sont raturés, des mots sur lesquels d’autres mots sont venus se poser. C’est-à-dire qu’au contraire d’un discours religieux qui souvent impose une vision unique du monde, ici Wu Tsang célèbre la pluralité des langages et leur rencontre. C’est un espèce de palimpseste, donc plusieurs couches de langages et d’idées, de visions qui se rencontrent, sur les paroles originelles de Fred Moten. Et cette conversation qui a lieu sur ce vitrail, c’est vraiment un manifeste aussi pour Wu Tsang d’un appel à la collaboration, à la rencontre de la pluralité des visions, la manière avec laquelle le monde que l’on dessine c’est finalement la somme des visions et des perspectives que chacune et chacun d’entre nous peut y apporter. Néanmoins, quand on s’approche de cette œuvre, qu’on découvre que ce vitrail et ces mots sont faits de reliefs, et c’est en fait de l’acide qui est venu abimer ou sculpter la finesse de ce verre. Et c’est pour Wu Tsang une métaphore du pouvoir corrosif du langage. C'est-à-dire que les mots que l’on peut employer pour décrire le monde et notre condition à travers lui sont à l’image de ce vitrail. Ce sont des mots qui peuvent agir sur le monde. Les mots et le langage que l’on peut employer ont une force et une vraie puissance, qui sont indéniables, et qu’il nous appartient de reconnaître et de valoriser.  Et aussi, c’est très important, cette œuvre permet à la lumière, et vit grâce à la lumière. Et c’est une autre forme de lumière que celle qui faisait vivre Safe Space, mais c’est encore une fois une éloge de la partie lumineuse de notre monde, de la possibilité toujours d’avancer guidé.e par cette force.

A côté de ces oeuvres apparaît une  oeuvre non moins lumineuse, mais qui en tout cas est une projection, The More We Read All That Beauty, The More Unreadable We Are, c’est-à-dire le plus nous connaissons, nous regardons, nous lisons cette beauté, le moins nous sommes déchiffrables, le moins on peut se comprendre. Ce serait peut-être une des traductions possibles de ce titre. Et dans cette vidéo, très belle, on retrouve différentes réflexions autour de formes de résistances. C’est une vidéo dans laquelle on trouve des extraits de la vidéo qu’on découvrait au premier étage, The show is over, mais on découvre aussi une doublure de Bette Davis et également des extraits d’un discours de James Baldwin, une figure extrêmement importante de la pensée activiste noire américaine, mais qui a aussi bien-sûr longuement vécu en France et qui est une figure extrêmement importante pour penser l’oppression et la lutte des populations noires américaines mais pas seulement. Et dans l’ensemble de ces témoignages qui sont autant de la fiction que du documentaire, que des réflexions, il y a toujours cette idée que la résistance à l'état de fait dans lequel nous vivons, dans la condition dans laquelle nous vivons peut être transformée. Elle peut être transformée au travers d’une beauté non-conforme ou très saisissante, très extraordinaire, comme celle de Bette Davis qui était comédienne un petit peu hors norme et qui révisait comme ça les canons de la beauté féminine classique et qui ainsi permettait d’étendre notre compréhension de ce qu’on estime être beau et puissant et séduisant. James Baldwin qui parle de son expérience, qui parle de la question de son existence, de son combat, mais aussi de la question plus violente des violences policières et de la violence en générale. Et puis une conversation entre deux érudits de musique et des héritages de la musique coloniale, qui parle de la manière avec laquelle la musique a accompagné les luttes, a accompagné les résistances et comment finalement elle fait partie des outils dont on peut s’emparer pour changer et transformer encore une fois nos perspectives sur le monde ou nos manières de le raconter et donc nos manières de le vivre et de le faire exister. Cette oeuvre c’est encore un manifeste, mais un manifeste tout en douceur qui nous invite à penser que les résistances sont possibles au travers des corps, au travers des esprits, au travers d’une perception transformée de la beauté et de ce que l’on estime être désirable. Et puis on est ensuite invités à monter au dernier étage de la Fondation, duquel on peut apercevoir par le balcon le vitrail, que l’on avait découvert quelques instants plus tôt. 

 

Et puis on découvre comme dernière oeuvre, mais aussi comme ouverture de l’exposition, c’est-à-dire qu’elle ne ferme pas les perspectives, mais au contraire nous invite à penser l’après, cette vidéo Sudden Rise, qui est une vidéo-montage très puissante, dans laquelle on entend une bande son qui fait penser à un rythme très entêtant, très entraînant qui revient sur l’histoire de la perspective. La perspective c’est-à-dire l’idée de regarder le monde au travers d’un point de vue unique. C’est une histoire du regard qui naît au moment du Siècle des Lumières, lorsque l’homme commence à se penser comme seul étalon du monde et comme échelle unique possible de compréhension des choses qui s’y déroulent. Et c’est en fait le début de l’anthropocentrisme, c’est-à-dire que tout doit être dessiné à l’image de l’homme. Et Wu Tsang essaye de réfléchir à ce moment comme un moment extrêmement important dans l’histoire de notre regard, dans l’histoire de notre conscience, dans l’histoire de notre société, c’est-à-dire que c’est la mise en place d’un regard très violent et très unilatéral sur les choses qui permet à l’homme de se prendre comme seule échelle du monde et qui lui permet de dessiner le monde en fonction de son regard. Et l’ensemble du diaporama qui se déroule dans cette vidéo, c’est bien celui et celles des conséquences de ce regard et de cette mise en place et elle nous invite comme ça à penser cet espèce d’ordonnancement du monde, la manière avec laquelle nous avons et nous tentons encore de faire de lui un espace en permanence maîtrisé, en permanence contrôlé, alors qu’on le voit bien aujourd’hui l’actualité nous rappelle à quel point notre civilisation et l’humanité peut être si fragile et à quel point nous sommes invités aujurd’hui à penser cette fragilité, cette vulnérabilité à l’aune d’une conscience renouvelée de ce que nous sommes. La vidéo Sudden Rise elle prend place sur un rideau, un rideau qui rappelle les prosceniums au théâtre, donc c’est la partie avant du décor du théâtre qui annonce l’ouverture des grands rideaux et donc d’une représentation qui est à venir. Ici le rideau de la vidéo est fermé, mais ce qu’il invite à penser c’est qu’une ouverture est possible. Cette ouverture de ce rideau sur le théâtre du monde. C’est une invitation pour Wu Tsang à repenser notre représentation de celui-ci et la manière avec laquelle chacun des acteurs à venir sur ce théâtre est à toujours réimaginer.